Chronique de novembre-décembre 2017

Contraintes de la CIPAV : inventaire de jurisprudence de fin d’année avant réassort

A la fin de l’année, se profilent des velléités de bilan sur le sort judiciaire des contraintes de la CIPAV. Cette année, cela se justifie d’autant plus que les échecs judiciaires de la CIPAV l’ont conduite en novembre à décerner une contrainte type au contenu modifié rendant nécessaire à partir de 2018 une évolution de l’argumentaire acéré à proposer aux TASS.

Pour avoir testé la plupart des TASS de France, dont ceux de La Réunion ou de Mayotte, il semble qu’il reste deux irréductibles TASS qui ont résisté à la vague d’annulations : le TASS de Nanterre et le TASS de Quimper. Ces deux TASS se sont montrés hermétiques à cinq moyens d’annulation proposés.

A l’inverse, le TASS du Cantal n’a pas hésité à répondre favorablement à cinq moyens d’annulation alors qu’il suffisait d’accueillir le premier. Sans doute l’absence systématique du demandeur à l’instance (la caisse) malgré une succession d’audiences de procédure à Aurillac a t-elle irrité le Tribunal qui s’est senti libre d’assaisonner la CIPAV, laquelle, naturellement, a fait appel, ce qui aura le mérite de provoquer un véritable débat en cause d’appel.

Aujourd’hui, les TASS annulent les contraintes de la CIPAV dans leur ancienne version pour différents motifs. Le motif de l’absence d’envoi de mise en demeure préalable relève d’un constat élémentaire et il est surprenant qu’un site de défense des adhérents de la CIPAV de grande visibilité – CIPAV INFO – s’enorgueillisse d’obtenir des décisions d’annulation sur ce motif. A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire ! Malheureusement pour les cotisants, l’absence de mise en demeure préalable relève désormais du cas exceptionnel. Il est révolu le temps où la CIPAV perdait les récépissés d’envoi et accusé de réception de ses mises en demeure...

La mode est plutôt à l’invocation d’un défaut de motivation. Ou d’une discordance de montants entre le décompte d’huissier et le montant visé à la contrainte, ou encore entre la mise en demeure et le montant de la contrainte.

Voire l’irrégularité de la signature, la contrainte faisant figurer une signature scannée du Directeur de la CIPAV. Sur ce dernier point, la CIPAV doit être la seule caisse en France à soutenir que c’est son « système informatique » qui génère une signature modélisée de son Directeur sur les milliers de contraintes qu’elle émet.

Nous considérons que ce processus ne satisfait pas à des conditions élémentaires de fiabilité permettant une vérification d’habilitation de pouvoir ou de signature. Le TASS de Périgueux a construit depuis juin 2016 une jurisprudence d’annulation en rendant successivement quatre décisions dont trois en novembre 2017, toutes déférées à la Cour d’appel de Bordeaux.

Un magistrat honoraire du TASS de Paris dont il y aurait beaucoup à redire sur sa manière d’appréhender les dossiers et de statuer a très récemment annulé une contrainte sur la base d’un argument astucieux du justiciable : la « référence » de la contrainte n’était pas visée dans le procès-verbal de signification d’huissier. Pourquoi pas mais le texte réglementaire impose que cette référence figure à l’acte d’huissier, sous peine de nullité de cet acte, mais pas de nullité de la contrainte elle-même...

En tout cas, en 2018, il faudra s’attendre à une accumulation de décisions des différentes Cours d’appel, probablement axées sur la question de la motivation de la contrainte notamment en provenance d’Aix en Provence, Versailles, Nîmes, Douai, Amiens et Paris. La Cour d’appel de Lyon aurait-elle ouvert le bal fin novembre ? Elle vient en effet d’infirmer un jugement de validation de contrainte en annulant l’acte pour cause de défaut de motivation.

Ainsi un débat en chassera t-il un autre. Lorsque les Cours d’appel règleront le sort des anciennes contraintes, les TASS devront déjà ajuster leurs décisions sur la base de l’examen des nouvelles contraintes de la CIPAV dont on doit bien admettre qu’elles sont plus motivées.

Dimitri Pincent
cipav.actionjudiciaire@pincent-avocats.com